A l’écart du tumulte
Moi, à l’idée de commencer 2023 avec un film de Martin McDonagh, le génial réalisateur de 3 Bilboards, les panneaux de la vengeance, ne pouvait que me réjouir. 114 minutes plus tard mon enthousiasme n’est pas retombé. Quelle merveille ! Sur Inisherin – une île isolée au large de la côte ouest de l’Irlande – deux compères de toujours, Padraic et Colm, se retrouvent dans une impasse lorsque Colm décide du jour au lendemain de mettre fin à leur amitié. Abasourdi, Padraic n’accepte pas la situation et tente par tous les moyens de recoller les morceaux, avec le soutien de sa sœur Siobhan et de Dominic, un jeune insulaire un peu dérangé. Mais les efforts répétés de Padraic ne font que renforcer la détermination de son ancien ami et lorsque Colm finit par poser un ultimatum désespéré, les événements s’enveniment et vont avoir de terribles conséquences. Le scénario a été primé à Venise et c’est parfaitement mérité. Mais il n’y a pas que le scénario qui soit remarquable dans ce drame, la réalisation dans ses moindres détails et l’interprétation sont formidables.
Le titre du film fait référence à une figure fantomatique légendaire de la mythologie irlandaise qui pleure la nuit pour annoncer une mort dans les environs. Ce huis clos en plein air est étouffant. Les personnages peuvent nous paraître étranges, en tout cas mûs par des sentiments souvent éloignés des nôtres. L’île est réduit à un microcosme imperméable à toutes les influences venues du continent pourtant si proche, où, pourtant, une guerre civile fait rage. Mais seuls parviennent jusqu’aux côtes d’Inisherin quelques explosions lointaines et étouffées. Tout est ici impeccables les costumes, les accessoires, les décors et les paysages sauvages. Mais surtout c’est le casting qui emporte tous les suffrages. Un grand film pour cette rentrée.
Colin Farrell a lui aussi était primé à Venise. Son affrontement avec l’immense Brendan Gleeson vaut à lui seul de se précipiter pour découvrir ce film. A leurs côtés on remarque surtout Kerry Condon et Barry Keoghan, Cette fable d’une amitié perdue est cynique, cruelle, violente, mais aussi mélancolique et tellement attachante qu’on est envoûté de bout en bout. Un drame de la solitude et de l’isolement qui vous hante bien après le mot fin. Il FAUT faire le voyage pour cette Irlande profonde aussi magnifique que tragique. Déchirant !